la maison sous le ciel



Une terre où habiter, un endroit où respirer, un pays où retrouver d'autres liens sociaux plus habitables.

Ici ce n'est pas … ma terre ni ma mer.
Ici c'est le bout de la Terre.
Ici je me sens en exil.






 Je n'ai nulle nostalgie des plages et des baignades. Ma terre n'est pas aire vacancière ni touristique.

Je ne suis pas de mer.
Et pourtant. Je ne peux vivre sans.
Il me manque les vents, le goût du sel, les innombrables nuances des algues, cette odeur de vase et le fracas des ressacs. 
Il me manque le cri des goélands, le sable qui glisse, et les haubans qui cliquètent.
Il me manque toutes les roches.
Il me manque l'estran, les galets, les grèves parfois.
Et le noir, le jaune, les blancs des lichens.






Je suis de terre.
Ma terre n'est pas aire vacancière ou touristique.
Ma terre est celle des cochons et de l'agro-industrie. Elle sent le purin lorsque le vent est d'ouest. Parfois. Ou alors tellement d'autres parfums. 
Savez vous combien la ville sent fort ?







Ici je suis en exil.
Nos accents me manquent, le roulement des R, ces tournures grammaticales qui sonnent étranges une fois passé La Gravelle rendent à chaque retour chaque discussion comfy.













Ici je suis en exil.
Elles me manquent nos demeures en granit, les portes aux linteaux arrondisles ardoises et la courée devant. Humbles manoirs, métairies …








Ils me manquent.
Les ajoncs, les gousses des genets qui craquent sur les talus. Ce marron inouï de la terre fraîchement labourée. Le chant de l'alouette. 





Ici je suis en exil.
Les gens de chez moi me manquent. Ceux là qui me regardent comme de la ville de l'est, et ceux là qui savent, si je raconte le commerce, les cousins et les lignages. Ceux là pour qui je suis la fille de  M. qui est le frère de M., la fille de M. et la mère de M qu'avait la ferme de B.
Ils me manquent ceux là que ma tante âgée de 92 ans me nomme comme si je savais qui est le cousin de qui, qui habite où .

Ces voisins avec qui je peux parler de leur travail d'agriculteurs ou de paysans, du temps d'avant que nous avons tous tellement voulu quitter, du présent et de la terre qui gémit, du futur qu'ils voudraient construire respectueux, histoire de pas en mourir de ce mensonge de la pseudo modernité .





Du futur que je voudrais re-construire, inventer, nourrir avec eux.

Et clore l'exil. 
Celui fou de vie, d'espoir qu'ailleurs serait mieux pour les enfants qui peuvent, mieux que notre terre qui était dite des ploucs par ceux là de la ville de l'est. Mieux que nos foyers et nos chemins, mieux que nos langues et nos musiques. Mieux que nos métiers. Mieux que  notre manière de nous saluer ou d'enterrer nos morts.
Clore l'exil. 
Celui de la honte, cette honte que nous avons mis une génération a entendre du côté de la domination, celui aussi de l'espoir de nos grands mères et mères que désormais nous pouvons remercier sans arrière pensées . 
Je suis celle dont ma tante dit à sa jeune amie de 86 ans : tu sais c'est la fille de M, celle qu'est notre docteur. Oui je suis leur doc, et si l'est de l'ouest m'a pris ma passion pour ce métier, je reste à jamais leur doc. Leur fierté et leur victoire. La violence du présent ne dit rien du passé et encore moins du futur.





Ici je suis en exil.

Retrouver la terre et oublier ne plus savoir les cousins, cousins issus de cousins issus de germains et tous ceux là qui de générations en générations de laboureurs et ménagères ont fait ces paysages, ces routes et ces chemins, ces talus, ces collines et ce sol.




Ne plus jamais être en exil.

Il est temps de refranchir ce foutu péage.











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